Refuge

Publié le par Reveur

 
-        Allo.. Boss !!
-        Mais où es-tu ? et pourquoi tu fermes ton portable ? je t’ai cherché partout !!
-        Pppfff, zéro moral, je fuis pour deux jours..
-        Ok, ok, m’interrompe ricanement, et cherche-toi surtout une femme !!
 
Le salop !! Il trompe bien sa femme et puis il faut dire que les étudiantes de vingt deux ans font couler la salive !! Il ne se gène guère de laisser traîner sa gerbe, et ces boules de feu qui rêvent d’un week end de rêve dans son chalet à Kélibia, un coin perdu au Cap Bon que seuls les gens aisés y ont une résidence de péché..
 
Alors une femme !! C’est tout ce qui me manque !! Cheat !!
Après tout, pourquoi pas ?? J’ai fouillé dans mon répertoire cherchant un numéro qui pourrait me plaire..
-        Allo.. J’apporte de la bière !!
-        Dis au moins « Bonjour » !!
-        Tu veux ou tu veux pas ?!
-        Ça fait une éternité..
 
La pauvre !! Je ne sais si je devrais avoir pitié d’elle ou de moi-même !! Elle ferait une vraie épouse mais..je n’ai ni l’envie ni la foi et elle le savait. Pourquoi donc ? Je n’en sais pas trop, j’avais besoin de m’évader et c’est tout.
Elle garde de moi mon respect pour elle et des beaux petits souvenirs, et elle m’a prié un jour de mentir pour lui faire plaisir.
 
Au petit balcon de son petit studio au premier, nous avons pris deux sièges en plastique, les yeux dans les yeux, je me détestais pour m’arrêter de la voir mais elle comprend, je suis comme ça et j’ai mes défauts et elle ? Elle m’accepterait avec me défauts.
-        Ça fait une éternité..
-        Tu m’as manquée !!
-        Menteur !! me dit-elle en riant, t’as une mine qui fait fuir. De quoi fuis-tu cette fois-ci ?!
-        Non. J’ai retiré mon inscri de mastère à la fac et je compte quitter ce bled.
-        Alors, tu viens faire des adieux ?!
-        Ne dis jamais ça, je déteste ce foutu terme..
Elle aimait Céline tout comme moi, et «You have ever been in love» me parvenait mélodiquement de sa chaîne, je me suis aussitôt mis débout, j’ai saisi son visage entre mes mains et caressé ses lèvres : 
-        T’es une amie qui m’est chère..
Elle aurai aimé que je l’embrasse, j’ai senti l’adrénaline monter à ses joues et son poids se pencher vers moi, j’ai dis :
-        Chuuuuuutt !!, et mon index sur sa bouche, tu veux une bière !!
-        Et si on sort ?!
Il faisait superbement beau, nous avons pris le 4, un métro qui mène au TGM où les trains mènent aux plages de Carthage et dans un coin que nous connaissons, nous avons traîné pour un bout de temps.. Elle me parlait de ses élèves et de son stupide collègue qui voulait l’épouser, des ses jours ennuyeux et des ses nuits de solitude..
-        Aies pitié de lui, épouse-le !! me moque-je.
-        Enfoiré !! Pourquoi pas toi, si j’en veux ?!
Nous avons marché sur le sable et il a reconnu nos pas, ce sont les mêmes fils d’empreintes qui déviaient évitant les vagues, les coquillages craquaient sous nos pieds et les mouettes viennent pirater notre intimité. Elle s’est retournée vers moi et m’interpella affectueusement :
-        Que fais-tu de ta vie ?! les années passent, te rends-tu pas compte ??
-        T’inquiètes, je suis heureux comme ça..
-        T’as plus d’envie et de désir, tu ne m’as même pas embrassée.
-        Tu sais que je t’aime bien..
-        Oui.. c’est ce que je n’arrête pas de me le dire..
-        Tu veux une bière !!
J’avais glissé deux paires de boite dans mes poches, je savais que nous retrouverons le même rocher où elle m’a embrassé pour la première fois.
Le soleil brillait aisément et un petit vent frais et piquant nous a obligé à choisir des blocs à l‘abri, je lui ai tendu la canette et de la mousse coulait encore sur ses bords, des rires d’un couple nous parvenaient qui nous partageait le rocher. J’aime cet endroit et je ne sais pas pourquoi et j’aurai voulu qu’il fasse partie de ma propriété privée.
-        Quand vas-tu arrêter de fuir ??
-        Je ne te fuis pas !
-        Je parle de ta vie..
Qu’est ce que tu en sais.. Ma vie n’intéresse personne, c’est une simple vie que, moi seul, l’ai choisi, elle n’a jamais été le type de vie qu’on admire. Les gens pensaient toujours à un foyer à dédaigner, une épouse à trahir et des enfants à négliger. J’en fais partie en quelques sortes sinon où sont mes gosses ? Il leur manquerait certes, la présence d’un père même s’ils sont certains qu’il les aime, les cinq cents billets que j’envoie chaque mois ne peuvent jamais leur substituer les tendres bras paternels.
Changeons de discours.
-        Qu’allons nous manger ce soir ?!
-        Ne dis pas que tu restes passer la nuit chez moi !!
-        Je suis un SDF pour deux jours !!
Et elle s’est jetée sur moi m’embrasser farouchement.
Dodo, mon amie, tu risques de ne plus retrouver mon avidité et l’ardeur de mes anciens baisers.. Je ne viens pas te partager un lit chaud, je viens passer des petits moments d’amitié.. Et cette nuit, j’ai bien peur d'aller décevoir le fou désir qu’elle m’a toujours réservé..
 
Toute la nuit, nous avons parlé. Elle m’a offert son Joking et ses pantoufles et elle est venue se serrer contre mon corps sur son unique canapé, la télé éclairait la chambre mais c’est un slow que nous écoutons depuis sa chaîne. Les spaghettis forts que nous avons pris au dîner fait remuer mes intestins mais la bière fraîche devrait les calmer. Elle n’a pas bu mais elle léchais de temps en temps ma boite et je dégustais le goût de sa langue dissoute dans ma bière.
Quel temps nous avons passé à parler, je n’en sais rien !! C’étaient des racontas interminables, des blagues, des contes de nos vies quotidiennes, les anecdotes de son école et les chroniques de ma fac. Les petits silences ne nous ont pas empêchés d’admirer cette compagnie et laissaient place à des petits baisers intermittents et des tendres caresses.. J’avais pourtant une humeur assoupie..
C’était une paix de nous retrouver dans ce noir bleuté, ce slow perdu et ce canapé qui supportais joyeusement nos deux corps, j’étais assis et je contournais avec ma droite sa sublime silhouette, je réglais inlassablement la couverture sur sa poitrine et je dessinais des thalamus sur les carreaux du tissu cotonné, je caressais les quelques mèches de ses cheveux qui viennent mélanger les lettres de mes écrits quand elle s'allonge pour me passer une autre bière. J'étais mi-présent, mi-conscient, mi-perdu..
 
 
Les yeux fermés, elle a murmuré :
-        Tu sais ?! ce qui me plait en toi, ce que tu viens pas juste pour coucher avec moi..
-        Et ce qui me plait en toi, ce que tu me reçois toujours en ami..
-        Arrête, j'étais amoureuse de toi un jour !! et elle a ri.
J'ai répliqué vaniteux :
-        Toutes les femmes que j'ai connues m'ont dis cela !!
-        Ce que tu as un charme..
-        Oh !! ça, c'est un avis d'ancienne amoureuse !!
 
Une vielle chanson que j'aime tant vient nous faire taire, Un Phill Collins qui chantait : "You have no way to ask me how I love you" et des belles chansons se succédaient : "It's all coming back to me now" un superbe duo de Meatloaf Feat & Marion Raven, "River" de Sarah Maclachlan et "Come down to me" de Saving Jane. J'aimais ces slows, j'étais né pour les aimer et, les écouter en cette compagnie me rend la vie agréable.
-        Dis-moi, toi qui me connais depuis tant ?
-        Qu'est ce qu'il y a ?!
-        Est-ce que j'ai le caractère de quelqu'un qui trompe ou qui trahit ?
-        Mais pourquoi tu me demandes ça !!
-        Non… c'est rien. Oublie..
Elle s'est leva, saisît mes joues et déposa un doux bisou sur mes lèvres humectées par la mousse de la bière.
-        Mais pourquoi tu as toujours cet air mélancolique, tu ne te plais pas en ma compagnie ? tu n'as pas envie de moi ?
-        Si, mais…
-        T'en fais pas, me coupa la parole comme pour épargner des prétextes qui ne peuvent jamais la convaincre et elle enchaîna tendrement: Je te comprends..
Et elle m'a affectueusement serré, sa douce poitrine qui convulsait me rappela les bras de ma mère. Et je me suis endormi comme un petit enfant anémié.
 
A dix heures de matin, je me trouvais encore sur le canapé. Sur la table basse, un café je dois chauffer, des gâteaux, une dose de miel et un carton sur lequel est inscrit un petit mot : "tu m'attendras, je reviens à midi." Et elle a signé : "avec mon amour, ou tu préfères mes amitiés ?!"
-        Oh la vache !! qu'est ce que je ferai d'elle ?!
J'ai bu le café froid, pris un gâteau et je me suis amusé à sucer mon doigt que je trompais dans le miel..
-        Je reste ?! Je reste pas ?!
Je reste, je reste pas, je reste, je reste pas …. Je reste ! C'était le dernier doigt trompé au miel ! C'est le jour de la chance !!
 
A sa cuisine, je faisais le chef.
-        Et qu'est ce qu'on a ?
Des laitues. Oh, j'aime les laitues ! Des haricots, c'est ce que je sais faire !! Et j'ai préparé de la crème pour le dessert. A midi mois quart, la table était prête avec une fleur au milieu et des bougies à allumer. Reste la surprise.
-        Désolé mon amie. J'ai été contraint à partir.
Quand elle a lu le carton fixé sur l'écran de la télé, j'ai cru qu'elle va le défoncer.
-        Sale con, il vient, il part sans même avoir la peine de m'attendre, juste pour l'embrasser. Je l'aime ce mec. Non, je le déteste.
Elle a nerveusement jeté sa serviette et laisser tomber son sac à main, elle s'est assise négligemment sur le canapé en sanglotant. Je suivais la scène depuis la vitre colorée de la porte de la cuisine. Elle me faisait de la peine. Elle tient à moi vraiment. Elle murmurait dans ses pleurs :
-        Sale con, sale con, et moi qui attendais qu'il vienne depuis un an.
Elle a fini par loger la cuisine et je me suis caché derrière la porte qu'elle vient d'ouvrir. J'ai vu ses mains se lever subitement cacher une émotion et des sanglot qui traînent encore quand elle a aperçu la table. Je l'ai contourné du derrière et elle a caché son visage dans ses mains, ses cheveux faisaient un rideau et elle sanglotait encore : 
-        Mais qu'est ce que j'ai dit ?! mais qu'est ce que j'ai fait ?!
-        T'en fais pas, je suis encore là.
-        Tu fais mieux de sortir, sale con !!
Et elle s'est retournée vers moi pour me dévorer. Et on a déjeuné ensemble comme des amoureux.
-        Maintenant, je peux sortir. Je dois quitter.
-        Restes encore juste pour une nuit, je t'en prie.
-        Tu sais bien que je dois partir..
-        Dis-moi au moins que tu reviendras.
Faut-il mentir encore une fois ? Je la respecte, cette femme, et je ne veux pas lui causer du chagrin. Tant de fois, je voulais la voir et je ne trouvais pas la force d'aller la chercher, quelque chose meurt en moi et je ne peux satisfaire une femme qui m'aime. Moi, je préfère une femme qui ne s'attends pas à ce que je l'embrasse quand je tiens son corps entre mes mains, mon désir peut surgir à tout moment mais je ne peux garantir qu'il surgira, seul l'instant d'une tendresse qui peut faire ressusciter en moi l'envie de repeindre ses couleurs avec un peu de ma magie.. J'aime les plaisirs qui viennent comme ça sans prévenir et je me réjouis parfois juste d'une caresse..
 
Dans le bus qui m'emmène pour retrouver ma chambre et mon PC, je collais mon visage aux vitres, je regardais le paysage lointain qui nous accompagnait et les arbres des entourages qui s'éloignaient, l'esprit perdu, seule sa question qui raisonne encore: "Que fais-tu de ta vie ?! Les années passent, te rends-tu pas compte ?"
-        Je m'amuse à la gâcher tout simplement !!
Je ne peux ni aimer de nouveau ni avoir une petite amie. Mais pourquoi devrais-je avoir quelqu'un dans ma vie ou vivrais-je pour quelqu'un ? J'ai besoin comme tous les hommes de cette tendre poitrine qui me reçoit avec allégresse quand j'aurai juste besoin de reposer ma tête et effacer les milles pensées qui encombrent mon crâne et oublier, juste oublier..

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